« Un événement est un lieu de catastrophe où la catastrophe n’a pas encore eu lieu »

Le médecin urgentiste responsable de l’assistance à l’événement

La demande de secourisme événementiel augmente. Pour une organisation efficace et qualitative, il est nécessaire de disposer d’un cadre législatif clair. « Une qualification professionnelle est désormais en place. Nous nous efforçons à présent de créer une profession de soins pour les secouristes », souligne Kenneth Arkesteyn, président de Belgambu. À cet égard, le point de vue et l’expérience d’un médecin urgentiste valent leur pesant d’or.

Le secourisme événementiel et la médecine d’urgence partagent des points communs évidents. Tant sur le terrain, où les organisateurs demandent souvent à un médecin urgentiste de diriger volontairement le dispositif médical, que dans les services d’urgence des hôpitaux voisins. Dans ces services d’urgence très sollicités, les événements peuvent augmenter l’afflux de patients et la gravité des soins. « C’est pourquoi nous devons être vigilants quant à la qualité des soins d’urgence pour tous et partout. Lors d’un grand événement, un habitant situé à deux rues de l’hôpital peut tout aussi bien avoir besoin de soins urgents. Il mérite lui aussi des soins appropriés. » La parole est au Dr Michiel Stiers, médecin urgentiste en formation, attaché à la KU Leuven, avec un engagement majeur au sein de BeCEP, l’association professionnelle belge des médecins urgentistes. « Le secourisme événementiel est l’extension de nos connaissances médicales et de nos tâches de gestion, tant aux urgences qu’en pré-hospitalier avec le MUG ou en cas de catastrophe. La nouvelle qualification et formation des médecins urgentistes fait que nous, jeunes médecins, sommes surqualifiés pour les événements. Sans cadre réglementaire, il n’est pas possible d’organiser ce secourisme événementiel de manière sûre et efficace. Aujourd’hui, il y a donc trop de prestataires, certains insuffisamment qualifiés, et le patient risque de recevoir une aide inadaptée ».

Mise à jour urgente de PRIMA

Cependant, un travail de fond a déjà été réalisé en Belgique. Le SPF Santé publique donne déjà des conseils sur les besoins d’un poste de secours médical adapté à l’événement par le biais du questionnaire PRIMA (Plan Risques et Manifestation). L’analyse de risque initiale et l’émergence de PRIMA sont aujourd’hui dépassées. Entre autres, elle ne tient pas compte de l’émergence et de l’expertise de la discipline de la médecine d’urgence. Cette évolution vers une prise en charge spécialisée et de qualité en urgence et dans l’aide médicale urgente (AMU) doit se poursuivre en secourisme événementiel. « La discipline de la médecine d’urgence a certainement une valeur ajoutée lors d’événements majeurs », estime le Prof Dr Pascal Vanelderen, président de BeCEP. « Toutefois, nous devons veiller à ne pas nous surréglementer. Nous contribuons à un cadre clair pour l’organisation du secourisme événementiel, avec des qualifications et des rôles clairs pour les différents profils. Le mieux est de procéder par étapes, afin que nous puissions également assumer et remplir notre rôle dans le cadre de cette transition.

« La position que nous occuperons en tant que médecins urgentistes jouera un rôle essentiel à cet égard », explique le docteur Pieter Jan Van Asbroeck, médecin urgentiste et collègue du professeur Pascal Vanelderen à l’hôpital Ziekenhuis Oost-Limburg. « En tant qu’urgentistes, nous ne faisons pas la différence en nous contentant degérer la salle d’urgence, mais en fournissant les ressources adéquates et les soins appropriés. Notre force réside précisément dans notre vision globale à la fois sur le plan médical, opérationnel et de la gestion. En tant que directeur de l’assistance médicale (Dir-Med), nous pouvons évaluer correctement les besoins médicaux à tout moment. Cette vue d’ensemble nous permet de réagir rapidement et de garantir des soins de qualité. Dans des scénarios de catastrophe, en cas de traumatisme grave ou pour traiter une pathologie sévère. Si le rôle important d’un Dir-Med est assumé par des non-médecins, nous perdons cette vue d’ensemble. Cette situation est pernicieuse pour la qualité des soins. »

Vers une réglementation à gradations ?

Pour les médecins urgentistes eux-mêmes, l’enjeu principal est de placer les bons profils au bon endroit et au bon poste. Un futur cadre législatif nécessite une stratification afin de choisir la disposition appropriée en fonction du type d’événement et des facteurs de risque tels que le nombre de visiteurs, le lieu, les attentes éventuelles en termes de consommation de drogues ou de risque de calamités, etc. « Nous devons travailler sur une définition claire des rôles et des profils pour le secourisme événementiel. Il nous semble logique de placer un médecin urgentiste sur le siège du conducteur, mais encore faut-il trouver les bons candidats. Le service des urgences fonctionne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et le secourisme événementiel doit fonctionner en parallèle », déclare le professeur Vanelderen. Pascal Vanelderen.

En tant que médecin urgentiste en formation, le docteur Michiel Stiers, médecin urgentiste en formation, souhaite contribuer à la régularisation de ce secourisme événementiel. « Notre secteur est en pleine transition. Nous devons profiter de cet élan au sein du secourisme événementiel pour poursuivre cette transition.
Le plus important est et reste que le patient reçoive à tout moment les meilleurs soins et les soins les mieux appropriés, et c’est précisément pour cela qu’un cadre juridique est si crucial. »

Un état d’esprit différent

En outre, un changement de mentalité s’impose parmi les organisateurs d’événements. Alors que les budgets consacrés à la sécurité sont généreux, on s’attend souvent à ce que le secourisme événementiel soit assurée par des bénévoles. « Nos réalisations restent souvent dans l’ombre. Si quelqu’un introduit de la drogue ou si des fauteurs de troubles se déchaînent parce que la sécurité est insuffisante, les médias s’en font l’écho. Or, si quelqu’un est victime d’une crise cardiaque sur le site et que les secours viennent de l’extérieur au lieu de passer par le poste médical du site, cet incident n’apparaîtra même pas dans la marge du journal. Pourtant, des soignants qui réagissent sur place de manière appropriée lors d’un évènement peuvent faire toute la différence », souligne le Dr Pieter Jan Van Asbroeck.

« L’impact de la sécurité se remarque immédiatement, alors que nous travaillons plutôt discrètement dans les coulisses, ce qui crée une appréciation différente», ajoute le Dr Michiel Stiers. « En se concentrant sur des soins durables et viables sur place, l’événement s’inscrit parfaitement dans le paysage changeant des soins de santé. Aujourd’hui, nous parlons d’une perfusion de soins, et il est difficile de faire peser une charge supplémentaire sur le système de santé si l’on n’est pas bien guidé. Le retour sur investissement du secourisme événementiel ne se limite pas à l’achat de boissons et de nourriture par le festivalier rafistolé sur place. Il s’agit de l’assurance d’une prise en charge optimale pendant l’événement et de la préservation de cette prise en charge malgré l’événement… C’est ainsi que nous transformons le secourisme événementiel en quelque chose de positif, qui sera ensuite, espérons-le, associé aux ressources adéquates. Le médecin urgentiste est le chef d’orchestre qui fait en sorte que toutes les parties prenantes travaillent ensemble de la meilleure façon possible.