Il est nécessaire d’établir des critères de reconnaissance pour les ASBL afin d’assurer une égalité de traitement entre les acteurs

Dans le domaine du transport non urgent de patients, les règles du jeu sont aujourd’hui inéquitables. Les services d’ambulance avec du personnel et les ASBL avec volontaires sont actifs sur le même marché, mais pas dans les mêmes conditions. Les ASBL bénéficient de conditions structurelles, qui leur confèrent un avantage concurrentiel par rapport aux entreprises. Et cela alors que ces ASBL ne le font pas (uniquement) pour générer une valeur ajoutée sociale. Belgambu trouve qu’il est temps d’y prêter attention !

En Belgique, tant des entreprises que des associations sans but lucratif sont actives dans le domaine du transport des patients. Lorsqu’il s’agit de rendre les soins accessibles à tous les patients, c’est une bonne chose. Mais pourtant, le bât blesse. Pour cette raison, nous nous concentrons sur les conditions fiscales et sociales des deux formes d’organisation. Des experts juridiques Michel Segers et Frederik Laevens de MVVP° Advocaten décrivent la situation difficile et aident à trouver des solutions.

Personnes morales contre impôt sur les sociétés

Une société est – logiquement – soumise à l’impôt sur les sociétés. Cela inclut les transporteurs commerciaux de patients. Les ASBL sont soumises à l’exception de l’impôt sur les personnes morales. « Toutefois, si elles exercent une activité de nature lucrative, elles peuvent être obligées d’opérer sous le régime de l’impôt sur les sociétés », nuancent les avocats Michel Segers et Frederik Laevens. « Il s’agit d’organisations qui cherchent des profits qui ne sont pas simplement destinés à soutenir l’action désintéressée de l’organisation. Par exemple, pas à un établissement de soins de santé qui, en tant qu’ASBL, transporte ses propres patients dans le cadre de ses activités sociales, ce qui est son objectif principal. »

Une ASBL assujettie à l’impôt sur les personnes morales bénéficie de nombreux avantages. Elle bénéficie d’un traitement fiscal plus favorable, qui se traduit, entre autres, par des exonérations fiscales pour leurs volontaires. Si le volontariat pour le transport non urgent de patients devient une activité structurelle et répétitive, et donc une activité rentable, ces avantages fiscaux devraient en principe disparaître. Les autorités fiscales peuvent alors intervenir et soumettre l’organisation à but non lucratif à l’impôt sur les sociétés. « Malheureusement, dans la pratique, nous voyons des acteurs utiliser abusivement le statut d’association sans but lucratif pour bénéficier de l’impôt plus favorable sur les personnes morales. Toutefois, les autorités fiscales n’effectuent que rarement des contrôles stricts, ce qui explique que bon nombre de ces organisations à but non lucratif restent dans l’ombre. Cela crée une concurrence déloyale par rapport aux organisations qui exercent ces activités avec des travailleurs rémunérés. Cela rend les choses particulièrement difficiles, surtout pour les petites entreprises et les entreprises en phase de démarrage », ont déclaré M. Segers et M. Laevens.

« Malheureusement, dans la pratique, nous voyons des acteurs utiliser abusivement le statut d’association sans but lucratif pour bénéficier de l’impôt plus favorable sur les personnes morales. »

Le recours aux volontaires reste possible

Une nuance importante : une organisation sans but lucratif qui est reconnue comme commercialement active et donc soumise à l’impôt sur les sociétés peut toujours compter sur des volontaires, y compris les exonérations fiscales pour les indemnités de frais, comme le confirme le 27e addendum à la circulaire sur le bénévolat (2023/C/2)1. Toutefois, ceci à condition que l’organisation à but non lucratif poursuive un but désintéressé et ne permette pas l’enrichissement personnel des membres ou des administrateurs.

Cela crée une double disparité dans les règles du jeu. D’une part, de nombreuses ASBL restent soumises à l’impôt sur les personnes morales, moins contraignant, même lorsque leurs activités sont de nature commerciale. D’autre part, même si elles sont soumises à l’impôt sur les sociétés, elles peuvent continuer à faire appel à des volontaires. Pour des activités similaires, ces transporteurs de patients doivent embaucher du personnel dans des conditions de rémunération et de travail normales, avec toutes les charges qui en découlent. Il en résulte un avantage structurel évident en matière de coûts par rapport aux ASBL opérant commercialement et une distorsion indéniable du marché.

Suggestions pour la Flandre

La bonne nouvelle ? La Flandre peut intervenir dans le cadre de ses propres compétences pour contrer cette concurrence déloyale, sans toucher au régime d’avantages fiscaux des organisations sans but lucratif à vocation purement sociale. La Flandre (ou d’autres régions) pourrait prendre l’initiative de créer des conditions de concurrence équitables :

  • Adapter les exigences d’accréditation pour les organisateurs de transport non urgent de patients. Par exemple, n’autoriser la participation de volontaires qu’à des activités manifestement non commerciales.
  • Limiter ou supprimer les interventions flamandes (par exemple par le biais d’une assurance mutuelle) pour les trajets réalisés par des volontaires au sein d’organisations commerciales sans but lucratif.
  • Introduire une évaluation objective des activités économiques et limiter l’implication des volontaires s’ils font preuve d’une approche commerciale claire.
  • Demander une révision de la circulaire fédérale qui limite les avantages fiscaux pour les volontaires dans les secteurs commercialement concurrentiels.

« Sans ces mesures, les règles du jeu resteront faussées et les organisations économiques à but non lucratif bénéficieront d’un avantage concurrentiel », concluent messieurs Segers et Laevens. De plus, sans changement de politique, la Flandre court le risque d’une action en justice pour absence de justification de cette discrimination. Il est donc nécessaire et défendable d’inclure le critère fiscal comme condition d’approbation dans le cadre d’approbation flamand pour le transport non urgent de patients.